« L’espace américain sidère. On a beau l’avoir vu cent fois au cinéma et même l’avoir physiquement traversé, la nature vous y attrape chaque fois à la gorge. »
Eric Sarner
Eric Sarner est journaliste, poète et aventurier. Ces trois caractéristiques m’intéressent. Il est rare qu’on place à côté du mot journaliste le mot poète. Comme si cela était trop abstrait, ne rentrant dans aucune case. Triste uniformisation sociale.
Le 13 juillet dernier, Anne-France Dautheville présentait son dernier livre « La vieille qui conduisait des motos » à l’Ecole des Filles à Huelgoat. Anne-France Dautheville est journaliste, écrivaine, motarde et aventurière (les qualificatifs manquent ! tellement elle est inspirante). Elle est la première femme à avoir fait le tour du monde en moto, début des années 70.
Le livre pour (se rappeler) d’aimer la vie
Voilà maintenant une dizaine d’années que je fréquente l’Ecole des Filles à Huelgoat, lieu culturel en centre Bretagne. J’ai retrouvé trace sur mon blog d’un premier billet écrit en 2010. Cette ancienne école, tenue aujourd’hui par Françoise Livinec, a un impressionnant pouvoir d’attraction. Au-delà des conférences exceptionnelles proposées l’été, ce lieu a beaucoup de charme. Et les femmes et les hommes qui parlent de leurs œuvres, du monde, qui exposent leurs peintures, leurs dessins agrémentent l’école d’ondes positives par leur art et leur enseignement.
Voir des Vrais gens
Je l’avoue (et je le lui ai avoué) je ne connaissais pas Anne-France Dautheville la motarde. Je pourrais effectivement éplucher tous les blogs et les sites à la recherche de femmes motardes célèbres. Et vous copier-coller leurs histoires, photos, piquées sur Wikipédia. Oui mais non. Ça ne m’intéresse pas. J’ai besoin de me frotter à l’humain. Depuis mes dernières (rares) interviews, je suis devenue accro. J’aime « me frotter » à la chair humaine. L’enrichissement personnel est multiplié par 150 dix milles. Même une déception (gentil sur le papier mais en direct un vrai blaireau avec toute sa machinerie…) est profitable ; ça aide à grandir. On me dit souvent que je suis une femme enfant. C’est le plus beau compliment que l’on puisse me faire. En effet, j’ai encore de belles choses à apprendre et des gens formidables à rencontrer. L’innocence m’apaise.
La conférence du 13 juillet 2019 : Rêve et réussite
Le jour de la conférence, nous sommes arrivés en avance. Je
n’avais pas remarqué qu’elle s’était assise en face de nous en attendant de
rejoindre son pupitre. Je ne sais pas si c’est un hasard, mais elle s’est
retournée au moment où mon cher et tendre me demande (en me montrant une page
du programme de l’été) si c’est bien « cette jeune écrivaine qui couche
avec Marc Lavoine ». Petit moment de solitude lorsqu’elle se lève et rejoint
l’estrade. Elle s’est peut-être dit qu’on était deux gentils abrutis…
L’entrevue débute. Elle commence par nous parler de lichen trouvé dans la forêt d’Huelgoat. J’avoue me sentir désorientée dès les premières secondes. Puis Symbiose, Entraide, Interdépendance,Différence, Amour aussi… voilà je suis embarquée, l’engrenage du circuit prend vie. Anne-France Dautheville parle avec poésie. Elle manie les mots, les sons avec finesse et beauté. Avec elle, même la pire des grossièretés serait dite avec classe. Je n’ai pas cette qualité, je suis tellement brute de décoffrage. En l’écoutant, je me suis sentie plus légère, plus jolie. Elle me ravit.
Séance Dédicace
Moment mortifère. Son livre à la main, l’héroïne offre de son temps pour une séance dédicace. Mes muscles commencent à se crisper et tous mes neurones foutent le camp. Les salauds. Ils se tirent, galopant, les lâches. Je suis là comme un rond de serviette qui s’accroche à son bouquin (j’existe j’ai acheté !!). Qu’est-ce que je vais lui dire !… alors forcément on dit toujours des conneries. Dans le fil de la conversation, elle me dit quelque chose qui m’a un peu secouée (mais j’aime ça, ça me remet d’aplomb) : je lui dis que « c’est courageux ! qu’est-ce que j’aimerais le faire… partir en moto dans des pays lointains… mais j’en serais incapable ! j’ai trop peur »… elle me répond du tac au tac « si les gens ont peur c’est qu’ils ne sont pas fait pour cela ». Je suis déçue de cet échange. Car d’une part, ma remarque était idiote, je n’ai pas peur des gens, de partir, d’aller à la rencontre de.. d’autre part, c’est une peur exprimant la peur de manquer. Manquer d’argent pour une réparation, manquer le virage… que la famille me manque (venez me chercher, je suis coincée dans un fossé !!). C’est mon petit confort de vie, rempli d’amour qui me ramène sur le chemin du garage. Alors peut-être que je ne suis pas faite pour cela… mais je ne suis pas convaincue, qui sait…
« La vieille qui conduisait des motos » mais pas que
Son livre parle de son road trip en moto. Pour ses 60 ans, elle enfourche sa teutonne, une 800 BMW, et part faire le tour des copains. Pour son passage auprès des amis, elle demande « une cuite et un gâteau » sinon rien. J’ai adoré son livre plein de clins d’œil, d’humour, de sensibilité, d’humanité. Quelle force, quelle singularité, quel optimisme. Cela faisait longtemps qu’un livre ne m’avait pas redonné vie et le goût de lire.
Il parle de motos, de rencontres, aussi de société, de psychiatrie, de croques monsieur, de féminité, de vieillesse, du temps, des arbres, de sexe un peu aussi !
Extraits
« …Depuis quelques années, notre société opère une
immense mutation. Nous étions bien tranquilles à l’intérieur de nos frontières
quand le monde a déferlé chez nous. Des immigrés avec ou sans papiers, des
produits moins chers qui torpillent nos productions, des idées qui bousculent
nos certitudes. Nous vivons petit, il nous faut penser grand. Toutes les
sociétés qui mutent se radicalisent, se recentrent sur des peurs…»
« …Tu seras un homme, ma fille ! Cette phrase n’a
jamais été prononcée, mais elle résume mon éducation. Les femmes convenables sont
des êtres incapables de réflexion, de discipline et de compétence. La preuve :
celles qui gagnent de l’argent sont des Juives ou des grues. Je suis partie
dans la vie tout de travers, corps de femme, goût des hommes, interdite de
féminité… »
Merci
Merci à elle pour tous ces partages de bonheur et de doute. Je suis fan.
Je vous présente ma famille d’accueil pendant ces 5 jours à Londres.
J’ai préféré partir chez l’habitant pour diverses raisons : le prix, la possibilité de rencontrer des habitants de Londres, une petite fille qui a presque le même âge que ma fille, Isabelle la maman qui est Brestoise. Isabelle parle bien sûr le français, Mustafa le comprend.
J’ai réussi à avoir quelques conversations avec lui. ça m’a fait du bien de parler anglais (oui j’ai eu un rêve… devenir prof d’anglais…mais ça c’est une autre histoire…).
Si vous cherchez un lieu pour dormir, je peux vous assurer que c’est une bonne adresse. Ils habitent à Ilford, à environ 30 min du centre de Londres sur la ligne de métro Central. Isabelle se débrouille pour venir te chercher si vraiment tu es perdue !, tous les deux m’ont donnée des conseils. Le soir, j’ai pu manger avec eux. Bref, ils ont contribué grandement à la réussite de ce séjour.
Vous pouvez les retrouver ici : https://www.airbnb.fr/rooms/442457
Peut-être à bientôt les Londoniens.